Le 10 avril 2011, déjà six mois de voyage... Difficile à croire, que la moitié d'une année se soit déjà écoulée. Même si en même temps j'ai l'impression d'avoir quitté la France il y a une éternité. J'ai justement reçu ce 3 avril, pour mon anniversaire, un colis plein d'amour de mes parents, avec entres autres trésors, des photos du jour de mon départ, à l'aéroport de Marseille. Et ça m'a fait un choc. Une photo de ce moment si particulier de l'au revoir. Me voir, être spectatrice de cette jeune fille qui s'éloigne peu à peu vers son avion, vers ce qu'elle a choisi, l'aventure. Spectatrice, mais sentir de nouveau les sensations de ce jour-là. Ce déchirement de l'adieu, dire au-revoir à ceux qu'on aime, à son pays, à ce qu'on connaît, ce qui rassure ; mais aussi l'excitation, cette chaleur mouvante dans le ventre, de partir vers l'inconnu, seule avec moi-même, mon sac à dos, et mes choix. Pas vraiment de peur, bizarrement, pas de panique non plus, mais cette envie, de découverte, de voyage, la certitude du départ. Merci papa, d'avoir fait ce jour-là ce qui m'a si souvent embarrassée, et que je t’ai souvent demandé de ne pas faire, prendre des photos en toutes circonstances... Ce jour-là aussi, j’ai failli ne pas te laisser faire. Mais ce cliché a son importance, et il est aujourd’hui placardé dans l’océan atlantique de ma super carte d’Amérique du Sud, dans ma chambre de Lima. Et il est comme un point de repère pour moi, l’image figée pour toujours de celle que j’étais ce 9 octobre 2010. C’est très étrange. Comme si tout d’un coup, cette simple photo me permettait de prendre la mesure du chemin parcouru. Du chemin physique certes, de la multitude de lieux visités, des nombreuses personnes rencontrées, des lieux où je l’ai roulée ma bosse, mais surtout de mon propre chemin, des montagnes que j’ai franchies, en six mois. Bien sûr, il y a des démons qui ne s’en vont pas comme ça, du jour au lendemain. Les montagnes ne se déplacent pas si facilement, mais il y a les cailloux, les pierres, puis les rochers, que je déplace chaque jour, peu à peu. Je crois pouvoir dire aujourd’hui avec grande fierté, et à voix haute, que je ne me considère plus comme quelqu’un de timide. Je ne suis pas non plus une personne exubérante ou extravertie, mais l’adjectif timide ne me convient plus, et ça c’est hallucinant. J’ai pris conscience ce fameux dimanche des six mois, que j’ai dépassé ce démon, cette chaîne qui m’a toujours alourdie. Et c’est vrai, on se sent plus léger quand on se libère de ses chaînes.
J'ai 24 ans. Dont six mois sud-américains. J'ai 24 ans en 2011, année du lapin que je suis. Année supposée tranquille, après les grandes révolutions (2010 oui, pourrait correspondre à une révolution, pour moi et pour une grande partir des gens que je connais).Déjà six mois à explorer, découvrir, rencontrer, me chercher, me trouver parfois, me perdre d'autres fois, m'étonner par moments, me faire peur aussi, et surtout apprendre. Chaque jour. Sur le monde et sur moi-même.Une maison, je n’en ai pas, des obligations, non plus, chaque jour est un nouveau choix, une nouvelle marche à franchir, d’un escalier qui grimpe à l’infini. Mon sac à dos comme un refuge, un compagnon, un identifiant. En effet, je suis ici une “mochilera”, qu’on pourrait traduire par routarde (qui vient du mot mochila, sac à dos…). Ce que je possède c’est un sac à dos, ma volonté et mes rêves.
Le monde est ma maison, et les rivières sont les lits d'où je rêve.
Commentaires
Du texte et des dessins, je ne sais lequel est le plus fort, le plus nourrissant. le dessin qui parle d'une femme dans la joie de vivre, la danse, les rencontres, une femme qui arpente le monde et trace sa route trouvant les traces des ancêtres et regardant bien en face les vivants... Un texte si fort si vrai, impressionnant. ça fait quelque chose de lire ces lignes!
quelles surprises tu nous réserves encore?